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LIVRES
INITIATION ET RÉALISATION SPIRITUELLE
INDEX

Contre la vulgarisation p.13
Métaphysique et dialectique p.19
La maladie de l'angoisse p. 30
La coutume contre la tradition p. 39
A propos du rattachement initiatique. p.46
Influence spirituelle et égrégores .. . p.64
Nécessité de l'exotérisme traditionnel. p.71
Salut et Délivrance p.77
Point de vue rituel et point de vue moral p.83
Sur la « glorification du travail » p.90
Le sacré et le profane p.96
A propos de conversions p.101
Cérémonialisme et esthétisme p.107
Nouvelles confusions p.116
Sur le prétendu «orgueil intellectuel». p.124
Contemplation directe et contemplation par reflet p.130
Doctrine et méthode p.136
Les 3 voies et les formes initiatiques p.144
Ascèse et ascétisme p.156
Guru et upaguru p.162
Vrais et faux instructeurs spirituels. p.167
Sagesse innée et sagesse acquise . p. 173
Travail initiatique collectif et « présence » spirituelle p.180
Sur le rôle du guru p.187
Sur les degrés initiatiques p.194
Contre le quiétisme p.198
Folie apparente et sagesse cachée. p.206
Le masque « populaire » p.214
La jonction des extrêmes p.222
L'esprit est-il dans le corps on le corps dans l'esprit' p. 229
Les deux nuits p.239
Réalisation ascendante et réalisation descendante p.251
APPENDICES p.270
http://www.index-rene-guenon.org/Access_book.php?sigle=IRS&page=7
CHAPITRE IV

LA COUTUME CONTRE LA TRADITION

Nous avons dénoncé à diverses reprises l'étrange confusion que les modernes commettent presque constamment entre tradition et coutume ; nos contemporains en effet, donnent volontiers le nom de « tradition » à toute sorte de choses qui ne sont en réalité que de simples coutumes, souvent tout à fait insignifiantes, et parfois d'invention toute récente: ainsi, il suffit que n'importe qui ait institué une fête profane quelconque pour que celle-ci, au bout de quelques années, soit qualifiée de « traditionnelle ». Cet abus de langage est évidemment dû à l'ignorance des modernes à l'égard de tout ce qui est tradition au vrai sens de ce mot ; mais on peut aussi y discerner une manifestation de cet esprit de « contrefaçon » dont nous avons déjà signalé tant d'autres cas : là où il n'y a plus de tradition, on cherche, consciemment ou inconsciemment, à lui substituer une sorte de parodie, afin de combler pour ainsi dire, au point de vue des apparences extérieures, le vide laissé par cette absence de la tradition ; aussi n'est-il pas suffisant de dire que la coutume est entièrement différente de la tradition, car la vérité est qu'elle lui est même nettement contraire, et qu'elle sert de plus d'une façon à la diffusion et au maintien de l'esprit antitraditionnel.
Ce qu'il faut bien comprendre avant tout, c'est ceci : tout ce qui est d'ordre traditionnel implique essentiellement un élément « supra-humain » ; la coutume, au contraire, est quelque chose de purement humain, soit par dégénérescence, soit dès son origine même. En effet, il faut ici distinguer deux cas : dans le premier, il s'agit de choses qui ont pu avoir autrefois un sens profond, parfois même un caractère proprement rituel, mais qui l'ont entièrement perdu par le fait qu'elles ont cessé d'être intégrées à un ensemble traditionnel, de sorte qu'elles ne sont plus que « lettre morte » et « superstition » au sens étymologique ; personne n'en comprenant plus la raison, elles sont d'ailleurs, par là même, particulièrement aptes à se déformer et à se mélanger à des éléments étrangers, ne provenant que de la fantaisie individuelle ou collective. Ce cas est, assez généralement, celui des coutumes auxquelles il est impossible d'assigner une origine définie ; le moins qu'on en puisse dire, c'est qu'il témoigne de la perte de l'esprit traditionnel, et en cela il peut sembler plus grave comme symptôme que par les inconvénients qu'il présente en lui-même. Cependant, il n'y en a pas moins là un double danger : d'une part, les hommes en arrivent ainsi à accomplir des actions par simple habitude, c'est-à-dire d'une façon toute machinale et sans raison valable, résultat d'autant plus fâcheux que cette attitude « passive » les prédispose à recevoir toute sorte de « suggestions » sans réagir ; d'autre part, les adversaires de la tradition, assimilant celle-ci à ces actions machinales, ne manquent pas d'en profiter pour la tourner en ridicule, de sorte que cette confusion, qui chez certains n'est pas toujours involontaire, est utilisée pour faire obstacle à toute possibilité de restauration de l'esprit traditionnel…/…